Déterminer le niveau de validité d’un test de terrain

Pour choisir un test de terrain répondant à un objectif d’évaluation particulier (puissance aérobie maximale, vitesse aérobie maximale), il est important d’en déterminer la validité. Avec la pertinence, la fidélité, l’accessibilité, et l’utilisation des résultats, la validité est l’un des cinq critères à considérer avant de choisir un test.  Article extrait de Cazorla (2004), Tests de terrain pour évaluer l’aptitude aérobie et utilisation de leurs résultats dans l’entraînement. 

Tests étudiés

  • de la plus grande distance parcourue en 12 min de Cooper (1968)
  • progressif de course navette de Léger et Lambert (1982),
  • progressif de course sur grand terrain de Léger et Boucher (1980),
  • progressif Vam-éval de Cazorla et Léger (1993),
  • progressif de course derrière cycliste de Brue (1985),
  • progressif de course à paliers de 3 min, ou test de l’Université de Bordeaux 2 (TUB2, Ca-zorla 1990).

Qu’est-ce que le niveau de validité d’un test ?

Il s’agit ici d’avoir la preuve expérimentale que chacun des tests sélectionnés mesure effectivement ce qu’il est censé évaluer. Le niveau de corrélation calculé entre le facteur directement mesuré et le résultat du test permet de vérifier sa validité.

Si la corrélation est élevée, connaissant le résultat du test, il est permis d’extrapoler le facteur à évaluer. L’inverse est aussi possible.

Selon les deux objectifs principaux assignés aux tests précédents, peut-on affirmer qu’ils mesurent effectivement VO2 max et la vitesse aérobie maximale ?

Validité et VO2 max

Bien que la connaissance de VO2max ne s’avère pas indispensable aux entraîneurs, aux éducateurs et aux sportifs, certaines épreuves sont très fortement corrélées à VO2max. Elles permettent d’extrapoler la consommation maximale d’oxygène avec un risque inférieur à la plupart des tests indirects de laboratoire.

En fonction de l’âge des sujets, la course navette de Léger et al. (1985) présente un niveau de corrélation compris entre 0,70 (n = 188 enfants) et 0,90 (n = 77 adultes).

L’épreuve de course sur grand terrain (Léger et Boucher, 1980) n’est par contre validée que pour prédire le VO2max de sujets adultes (r = 0,96 ; n = 25 adultes). Par contre le résultat de ce test permet aussi une très bonne prédiction des performances de demi-fond (r = 0,96 ; n = 23 adultes) et de fond (r = 0,96 ; n = 24 adultes). Il en est de même du test de Brue (1985) : r (1500m) = 0,96 ; n = 12 et r (3000m) = 0,91 ; n = 11. Ces trois tests sont donc respectivement validés pour prédire VO2 max (navette et course sur piste) et la performance de longue durée (course sur piste et Brue), ce qui n’est pas le cas du test de Cooper qui, selon les populations étudiées et selon les auteurs, présente des niveaux de corrélation non significatifs ( r : 0.24) à très significatifs (r: 0.94). Cette grande variabilité interdit d’adopter sans réserve cette épreuve pour prédire VO2 max.

Validité et VAM

Le concept de vitesse aérobie maximale (VAM) ou vitesse limite atteinte à VO2max (Vmax) suscite un grand intérêt chez les entraîneurs, les enseignants d’EPS et les sportifs. La connaissance de cette vitesse chez un individu donné n’est cependant pas aussi simple qu’elle en a l’air. En effet, la VAM dépend non seulement de multiples interactions biomécaniques et physiologiques (figure 1) mais aussi du protocole du test censé l’obtenir (figure 2).

Au nombre des interactions, le VO2max, le rendement énergétique encore défini comme l’économie de course (Sjödin et Svendenhag, 1985 ; Daniels, 1985 ; Ouvrier Buffet, 1988 ; Peronnet, 1988 ; Morgan et al, 1989 ; Lacour, 1990) et …la motivation en sont les principales.
Ainsi la VAM résulte à la fois de l’économie de course et du VO2 max. Connaissant la VAM, VO2max ne peut être extrapolé qu’en tenant compte de l’économie de course qui, selon les individus peut varier entre + 5%.

Figure 1. Différentes interactions à l’origine de la performance au ½ marathon et au marathon

Un autre point et non des moindres est que la Vam peut aussi varier en fonction du protocole du test. D’une manière générale, plus l’augmentation de la vitesse des paliers est brutale et de courte durée, plus la Vam a des chances d’être surestimée. Dans ce cas, une part importante de la Vam est liée à la production anaérobie de l’énergie.

A l’inverse, plus la durée du protocole est importante, plus la Vam risque d’être sous-estimée probablement à cause des effets de la fatigue qui limitent la poursuite de l’exercice.

Figure 2. Différentes conditions expérimentales susceptibles de surestimer ou de sous estimer la vitesse aérobie maximale à l’issue d’épreuves triangulaires habituellement utilisées

En s’appuyant sur le protocole de Daniels et al, 1984, c’est de cette hypothèse qu’ont procédé nos travaux pour vérifier si la vitesse aérobie maximale correspondait à une et à une seule réalité. Dans un premier temps au moyen d’une épreuve, très courte avec incrémentation en rampe, nous avons mesuré directement les VO2max de 17 étudiants sportifs volontaires. Les VO2max obtenus devenaient les valeurs références (100%).

Nous avons mesuré ensuite les VO2 correspondant à cinq paliers de 6min courues à vitesse infra maximale avant que ces étudiants passent dans un ordre aléatoire quatre des tests précédents : Léger-Boucher, Tub2, Vam-éval et Brue. Comme l’indique la figure3, à partir de la régression linéaire obtenue avec les cinq paliers infra maximaux et leurs vitesses de course, nous avons extrapolé la vitesse correspondant à VO2max (V max). Les résultats sont présentés par la figure 3 et dans le tableau 2. Ces résultats montrent une vam extrapolée de 17,32km/h.

Figure 3. La linéarité de la relation VO2 vitesses infra maximales de course permet d’extrapoler la Vam.

En fonction des protocoles utilisés, on peut constater cependant que les Vam obtenues à partir des tests TUB2 et Vam-éval se rapprochent le plus de la Vmax référence : 17,32 + 0.96 km.h-1. En outre dans cette même étude nous avons obtenu des Vmax spécifiques au CAT- test supérieures de 1,5 km.h-1 par rapport à la Vmax référence !

Les Vam obtenues peuvent s’échelonner entre 17.2 + 1.1 km.h-1 avec le test sur piste de Léger et Boucher et 17.8 + 0.9 km.h-1 avec le test derrière cycliste de Brue, 1895 (tableau 2 ci-dessous) ce qui constitue un handicap certain lorsque l’on veut utiliser la Vam comme référence pour planifier les intensités d’entraînements ou pour mesurer l’endurance aérobie d’une personne (Péronnet 1988, Péronnet et al. 1991, Billat et Koralztein 1996).

Léger – Boucher Vam-eval Vam extrapolée Tub 2 Brue
Vam 17.2 17.3 17.32 17.4 17.8
km/h-1 + 1.1 + 1.1 + 0.96 + 1. + 0.9

Tableau | Vam (?) obtenues par les mêmes sujets ( n = 17) aux quatre tests. Différence significative p<0.05 (test wilcoxon) entre Léger-Boucher et Brue.

Autrement dit, il existe autant de Vam qu’il existe de protocoles, ce qui peut expliquer pourquoi des différences souvent importantes sont obtenues au niveau des durées pendant lesquelles les sujets évalués sont capables de courir à 100% de leur Vam. Rappelons que l’endurance aérobie étant définie comme «le pourcentage de la puissance aérobie maximale (ici représentée par la Vam) susceptible d’être maintenu le plus longtemps possible » de nombreux auteurs utilisent la durée de course à 100% de Vam pour l’évaluer (Billat et al. 1994, Berthoin et al. 1995). Selon Péronnet et al. 1991, la durée de course à 100% de VAM obtenue avec le test de Léger-Boucher serait de 7 min avec des sujets moyennement endurants. Il est évident que cette durée devrait être inférieure en utilisant les autres tests et plus particulièrement le test de course derrière cycliste de Brue (1985) et a fortiori le C.A.T. test qui surestime de façon importante la Vam.

Aussi, afin d’éviter les actuelles confusions, nous suggérons d’utiliser le concept de Vam spécifique en précisant le test avec lequel elle a été obtenue (ex : Vam Léger-Boucher, Vam Tub2, Vam-éval, Vam Brue) plutôt que le concept unique de Vam qui peut prêter à certaines confusions .
Remarque :

  1. Le test Vam-éval a été élaboré pour rendre le test Léger et Boucher plus accessible et plus précis. La pente d’augmentation de l’intensité étant rigoureusement la même : ½ km.h -1 par palier de 1 min à la place de 1 km.h-1 par palier de 2 min, le test Vam-éval bénéficie indirectement du niveau de validité du test de Léger et Boucher. Par contre les Vam obtenues s’avèrent plus précises au ½ km.h-1 près avec le test Vam-éval.
  2. Une étude très récente (Hourcade 1997) ne montre aucune différence significative entre les Vam obtenues au Vam-éval et celles obtenues au TUB2 . On peut donc indifféremment utiliser ces deux tests pour obtenir la Vam.

Au sujet de l'auteur

Georges Cazorla – Docteur en biologie de l’activité musculaire - Président de l’Aréaps. Je suis actuellement : - Conseiller scientifique et membre du Comité Scientifique du centre d’évaluation et de préparation physique Monstade (www.monstade.fr) - Membre de la Cellule Recherche de la Fédération Française de Football

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